Tous les articles par Daniel Curtit

Melisey. Histoire des Vosges saônoises. XIXe siècle.

Entrelacer les végétaux…

La shaarl diffuse toujours avec plaisir les programmes culturels que lui communiquent les associations de la région et les institutions, à condition bien sûr que les manifestations présentées n’ignorent point l’histoire, les patrimoines, la mémoire… Le Parc des Ballons des Vosges nous signale par exemple, cette semaine, une exposition intitulée : (cliquer sur le lien)

Entre (Nid), L’art d’entrelacer les végétaux

L’architecture terreuse et ligneuse est encore bien en place dans la Haute-Saône du XIXe siècle ; beaucoup de toits de chaume, que les tuiles ou les laves remplaceront tardivement, car les murs de pisé, de torchis, de bois et de terre ne supportent pas le poids des pierres… Palissades, barrages de rivières… sont composés de fascines. Le 16 mars 1822, le maire d’Ecromagny se plaint auprès de la préfecture, parce que le garde forestier interdit l’extraction de la glaise nécessaire à la reconstruction des granges, maisons et bâtiments… Sur les 397 maisons de Melisey, en 1881, 295 n’ont qu’un seul étage…

Les Baraques, au pied du mont de Vannes, avant 1914 (St-Barthélemy / photo Charles Cardot / Centre Ressources Photographie de Lure)
Les Baraques, au pied du mont de Vannes, avant 1914 (St-Barthélemy / photo Charles Cardot / Centre Ressources Photographie de Lure)

L’exposition Entre (Nid) peut articuler ces paysages élémentaires du passé avec aujourd’hui et demain ; elle se déroule d’ailleurs au fil du temps, avec des tressages, des photographies, des dessins qui montrent les liens multiformes entre les habitants et la nature, les expériences et les endroits qui les accueillent. Ainsi les manières d’écrire les mondes passés et actuels osent franchir aujourd’hui l’espace clos d’une discipline académique et se transporter sur toutes sortes de supports ; l’histoire peut se décliner dans une exposition de photographies, une bande dessinée, une pièce de théâtre… et la Shaarl qui prépare déjà une grande exposition BOIS pour 2017 (après l’exposition PIERRES de 2014) commence aussi de réfléchir à toutes ces formes nouvelles pour raconter l’histoire, comprendre le réel…

Internet, notre allié ?

Je viens d’effectuer une petite recherche sur Joseph-Etienne Pouguet, charpentier, mécanicien et meunier à Ornans, qui est à l’origine de la construction des roues à eau pendantes qui ont équipé, à partir des années 1810, bon nombre d’établissements qui trouvaient leur énergie dans le courant de la Loue. La Société d’encouragement pour l’industrie nationale lui a décerné un prix, en 1821… Cette association, fondée en 1801 par Bonaparte, existe toujours et conserve la mémoire du patrimoine industriel en diffusant un bulletin (quelques centaines à plusieurs milliers de pages chaque année, depuis 1801)… Pour trouver un compte-rendu relatif à l’invention de Pouguet, je pars donc à la recherche d’un bulletin sur Internet et trouve effectivement quantité de documents de cette société en vente sur la plupart des sites marchands ; le prix moyen d’une revue annuelle oscille autour de 50-100 euros ; mais quelle année choisir ? plusieurs milliers de pages, quelques dizaines de bulletins entre 1810-1830…

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J’ai eu un mauvais réflexe avec les sites marchands, car la Société d’encouragement possède son propre site, avec la mise en ligne de tous les bulletins des années 1801 à 1943 et un outil de recherche permettant d’accéder, en quelques minutes, aux trois occurrences Pouguet et donc aux articles décrivant son invention (année 1822). C’est rapide, gratuit, efficace.

Petite leçon : avant d’acheter souvent très cher un document qui va vite s’empoussiérer sur le rayon d’une bibliothèque, consulter les ressources numériques, par exemple Gallica (Bibliothèque nationale de France) et ses millions de ressources numériques.

Ces quelques remarques invitent seulement à une réflexion sur la constitution, la composition et l’utilisation future de nos collections et de notre bibliothèque… Des trésors sont bien sûr partout en perdition, et tout particulièrement des archives, des papiers… que la SHAARL sait très bien repérer dans sa quête annuelle de livres par dizaines de tonnes (Bouquimania) ; des archives images concernant notre arrondissement (cartes postales, photographies…) sont aussi à surveiller sur les sites marchands et n’excluent pas bien sûr un commerce intelligent… Mais la confrontation avec les ressources numériques en ligne n’est-elle pas de plus en plus nécessaire ?
Les sciences sociales, l’histoire connaissent aujourd’hui une effervescence, source d’un nouvel enthousiasme, abordent le passé et le présent en mêlant formes, approches, méthodes différentes. La collection, la compilation sont bien sûr utiles, nécessaires à l’histoire, mais son écriture n’a plus de lecteurs, si elle devient indigeste, simple machine enregistreuse de faits… À la preuve du document doivent s’ajouter le plaisir et l’émotion d’une réflexion…

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Appel à contribution : une enquête de belle envergure est conduite sur les linteaux de Haute-Saône, depuis quelques années, conjointement par la SALSA et la SHAARL. Une poignée d’images, une définition de cet objet architectural, un essai de mise en ordre, de réflexion, quelques récits d’enquêtes sur le terrain… ne seraient-ils pas la bienvenue sur nos sites respectifs ? Pour susciter les curiosités, créer une appétence,  du livre à venir dont on parle, par exemple…

Sur ce sujet, Michelle Marchal (shaarl) nous signale une conférence et un site :
Les secrets des marques des tailleurs de pierre, par Claude Oberlin
(mardi 9 février 2016, à 18h30,  au PMC à Colmar / Pôle Média-Culture Edmond Gerrer / 1 Rue de la Montagne Verte, 68000 Colmar)
Voir le site de Claude Oberlin consacré à la glyptologie, qui étudie les signes gravés dans la pierre, les marques de tâcherons, par exemple… et encore ces quelques pages évoquant les linteaux.